Bordelaise vignette

La vache Bordelaise était une race laitière de la région de Bordeaux qui s'est largement diffusée dans les Landes, la Dordogne et tous les départements voisins. Elle servait à approvisionner Bordeaux en lait frais et en beurre. Très implantée dans toute l'Aquitaine, la population a fortement chuter en 1870 à la suite d'une épidémie de péripneumonie, mais a réussi à se relever.

Bordelaise 1Suite à la politique de réduction du nombre de races françaises en 1950, la Bordelaise n’a pu se maintenir et fut considérée comme disparue, jusqu’à ce que le Conservatoire des Races d’Aquitaine relance en 1987 un programme de reconstitution de la race à partir des dernières vaches bordelaises retrouvées en différents points de la région. Elle se redéveloppe aujourd’hui doucement et est utilisée aussi bien pour la production laitière qu’allaitante. Elle convient particulièrement pour de petites structures et pour la commercialisation en vente directe.

Une première renaissance au début du XXè siècle
La race Bordelaise par son profil laitier, sa robe pie, son allure générale, tranche nettement avec les autres races du Sud-Ouest à robe unie, qui étaient toutes excellentes pour le travail. L’origine de cette race laitière élevée à la périphérie de Bordeaux pour l’approvisionnement de la ville en lait frais a toujours intrigué. Certains font remonter l’origine de la race à des animaux importés par les anglais lors de la guerre de Cent-Ans. D’autres assurent que la race bordelaise est un croisement opéré naturellement entre les animaux de la race hollandaise importés par les Flamands venus sous Henri IV pour colmater les marais bordant la Garonne et les animaux d’origine bretonne présents traditionnellement dans la région. Quoi qu’il en soit à la fin du XVIII° siècle, une population de vaches laitières rustiques, de taille moyenne à petite, à robes bigarrées était déjà présente et appréciée autour de Bordeaux. 

Entre 1870 et 1872 une épizootie de péripneumonie ravagea la population bovine de la Gironde et anéantit presque complètement la race. Quelques animaux isolés et quelques rares troupeaux échappèrent cependant au fléau.

Pour que la race se reconstitue il fallait une approche méthodique. Les caractères de la Bordelaise furent définis et un Herd-Book créé en 1898. L’année suivante un premier bulletin fut publié par la Commission du Herd-Book : 24 animaux y figuraient. Assez tolérante au début, la commission devenait chaque année plus sévère. Elle n’admettait plus la moindre tache blanche à la tête, qui devenait entièrement noire ainsi que l’encolure et les pattes. De même une moucheture plus régulière dite "pigaillée", petites taches blanches sur un fond noir, fut exigée. En 1904 la race Bordelaise était définitivement consacrée par son admission au Concours Général de Paris où elle eut un succès retentissant. La race était rétablie.

Bordelaise carte postaleEntre les deux guerres, la Bordelaise, bien que déjà en concurrence avec la Frisonne - présente depuis longtemps dans la région de Bordeaux - se maintient et se répand même dans les départements voisins de la Dordogne, des Landes, des Pyrénées Atlantique tout en restant cependant, au niveau national une petite population qui ne dépassait pas semble-t-il les 4 000 vaches. En 1929 le Herd-Book comprenait 100 taureaux et 900 vaches et élèves répartis chez 250 propriétaires.

Après la dernière guerre, la race, dont le Herd-book ne fonctionne plus n’est plus présentée au Concours Général de Paris et n’est pas admise pour l’insémination animale comme beaucoup d’autres petites races. Peu nombreuse, elle ne résistera pas à la poussée de la Frisonne adoptée par les riches propriétaires des châteaux bordelais. Réfugiée dans le Médoc elle aurait compté encore prés de 700 vaches en 1958 et aurait définitivement disparu à la fin des années soixante, début des années soixante-dix.

Une reconstitution réussie mais fragile
Lorsqu’à la fin des années 1970, les premiers programmes de conservation se mettent en place, notamment à l’initiative de l’Instit de l’Elevage (à l’époque l’ITEB), des contacts sont pris avec l’Etablissement Départemental de l’Elevage de la Gironde qui transmet quelques adresses de troupeaux bordelais "possibles". Vérification faite ces troupeaux avaient cessé soit d’exister, soit d’avoir des Bordelaises. Quelques éleveurs possédant un animal isolé, contactés par téléphone en font une description qui ne correspond pas à celle du standard traditionnel. Ils ont une ligne blanche sur le dos. La situation est jugée trop critique pour que des actions puissent être menées.

Bordelaise 2En 1987, le Conservatoire des races d’Aquitaine, nouvellement fondée, se met en quête, lui aussi, de ce qui aurait pu rester de cette race Bordelaise. On signale alors comme étant des "bordelaises", des vaches appelées localement "bayrettes" (panachure de type Pinzgauer : ligne dorsale blanche, tête noire et "chaussettes"). Le rapprochement est fait entre ces "bayrettes" et celles des Landes. On est bien en présence de descendants de la race Bordelaise mais d’une Bordelaise dont le patron coloré dit "bayrette" avait été exclu du standard officiel établi par le Herd-Book quand il fonctionnait et qui n’acceptait, lui, que la robe "pigaillée". Dés lors les choses s’éclaircissent. Si on fait abstraction de la robe pigaillée qui était la seule robe admise à cette époque par le Herd-Book et qui l’amenait à exclure toutes les bayrettes, on pouvait à nouveau reconsidérer ces bayrettes comme une composante de la Bordelaise traditionnelle. Il devenait possible en accouplant entre eux ces bayrettes (caractère simple, autosomal, dominant) de tenter de reconstituer une population proche phénotypiquement de l’ancienne population locale.

D’autres vaches de type bayrettes, parfois avec du sang Limousin, sont alors retrouvées dont certaines présentent également quelques mouchetures noires sur les panachures blanches. Les animaux pigaillés étaient recherchés pour leur esthétique originale mais les bayrettes étaient réputées pour leur plus grande rusticité et meilleures qualités laitières.

Bordelaise taureauQuelques vaches sont rachetées par le Conservatoire des Races d’Aquitaine aidée financièrement par le Conseil Régional d’Aquitaine et la semence d’un taureau, TORNADO, né en 1990, est collectée par les soins de l’Union Midatest (devenu aujourd’hui AURIVA). De ce taureau TORNADO et de la vache MUSTI naîtra en 1993 la vache ISA qui présente la robe bayrette mais aussi des mouchetures rappelant la robe pigaillée qu’elle transmet à certains de ses descendants ce qui laisse penser que la robe pigaillée peut se cacher sous la robe bayrette et qu’elle est susceptible de réapparaître au fil du temps. Ce qui s’est confirmé par la suite avec la naissance d’animaux dont la robe se rapproche de la robe « pigaillée » tant appréciée.

Depuis 1990 des vaches et des taureaux ont été regroupés sur différents sites (Leyssart, Cousseau, Audenge, Bruges, etc) et suivis par le Conservatoire des races d’Aquitaine ou confiés à des institutions partenaires. De plus en plus de particuliers s’intéressent également à ces animaux. La reproduction est aujourd’hui plus facile grâce à un cheptel plus nombreux, mais le tri pour ne garder que les individus les plus caractéristiques ne doit pas se faire trop vite, au détriment de la gestion de la variabilité génétique, particulièrement étroite dans cette population.

Bordelaise vache et veauUn avenir à encourager
Même si la race bovine Bordelaise d’autrefois n’existe plus, du fait du peu d’animaux de race pure retrouvé au début de sa reconstitution, les animaux qui naissent aujourd’hui présentent des éléments et des caractères de l’ancienne Bordelaise. On essaye aujourd’hui de baisser progressivement la proportion de sang Limousin présente dans certaines souches, et plus généralement de toutes les races allaitantes, pour viser des animaux avec au moins 7/8 de sang de race laitière. L’augmentation progressive des effectifs permet au fil du temps de faire un tri de plus en plus sévère sur les robes, comme cela avait été fait après la création du Herd-Book en 1898. L’objectif final serait de ne garder que les animaux de type bayrette, à tête noire, sans étoile au front, avec ou sans mouchetures dans les panachures et les robes de type pigaillé que l’on voit réapparaître. De très beaux spécimens existent que l’on ne peut rattacher à aucune autre race, ils sont la démonstration de la réussite de ce programme de reconstitution.

La Bordelaise est donc en train lentement de retrouver sa place dans le Sud-Ouest, celle d’une race locale, plutôt laitière, de taille moyenne à la robe caractéristique. Les éleveurs de plusieurs troupeaux pratiquant la transformation à la ferme en ont inclus dans leur cheptel que ce soit pour la production laitière ou allaitante, et participe à son redéveloppement. Sa population compte aujourd’hui environ 150 femelles présentent dans une quarantaine d’élevages.


Delphine DUCLOS - Institut de l'élevage


Pour en savoir plus :

Conservatoire des races d’Aquitaine
Bordeaux-Sciences-Agro Bâtiment du Médoc - 1, cours du Général de Gaulle - CS 40201 - 33175 GRADIGNAN Cedex - 05 57 35 60 86
Site web : http://racesaquitaine.fr/

Institut de l’Elevage - OS des races bovines locales à petits effectifs
Delphine Duclos - Institut de l’élevage - BP 42118 – 31321 Castanet Tolosan cedex
05 61 75 44 59 – Cette adresse e-mail est protégée contre les robots spammeurs. Vous devez activer le JavaScript pour la visualiser.

Source : fiche sur la race Bordelaise rédigé par Laurent AVON (Institut de l’Elevage) en 2009.

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