Maraichine1

Selon certains auteurs comme Louis Gouraud (1867) la race dite "Maraîchine" serait issue de la race Hollandaise et de la population dite "Poitevine" ou "Vendéenne" ou encore du "Bassin de la Loire" (Sanson).

La race Hollandaise serait arrivée avec les Néerlandais venus dessécher les marais de Vendée et de Charente Maritime au 17è siècle. Ils y auraient amené aussi des moutons (à l’origine de la race de Deux ou de Belle Isle) et des chevaux (peut être à l’origine du cheval Mulassier). Louis Gouraud en 1867 constate que : "la robe, autrefois si variée dans ses couleurs, tend à devenir uniforme comme celle des bœufs de Parthenais. On ne voit plus autant en effet, de ces pelages pie, noirs et fauves, jadis si communs sur les animaux du Marais.

Maraichine2D’une manière générale la race dite "Maraîchine", au 19ème siècle, est décrite par plusieurs auteurs comme une race de couleur "brun fauve", de grand gabarit, osseuse, à l’aspect fruste voire primitif mais très bonne laitière comparativement à sa cousine Parthenaise. Elle avait aussi la réputation de pouvoir fournir des bœufs à la taille "colossale" nécessaires pour travailler des sols d’une grande résistance. Son lait, riche en matière grasse, sera apprécié des laiteries qui se constitueront dès la fin du 19ème siècle, faisant la réputation du beurre dit "de Charentes-Poitou".

Très vite cependant, parce que la tendance générale allait dans le sens de l’amélioration de la précocité et de l’affinement du squelette, les éleveurs vendéens sont allés acheter des taureaux Parthenais dans les Deux Sèvres tout en cherchant cependant à garder un type d’animal laitier d’autant plus nécessaire que leurs revenus  dépendaient plus de la production laitière que de la vente de reproducteurs, spécialité des Deux Sèvres, et qu’ils étaient plus éloignés de l’influence favorable du marché de Parthenais pour la vente des bêtes de travail, de viande et de forme. En 1893 est créé un livre  généalogique de la race bovine Parthenaise avec trois section : 1/ des Deux Sèvres et de la Vienne, 2/ Nantaise, 3/ Vendéenne. Le Herd-Book Parthenais étant tombé en sommeil vers 1903, le Préfet de la Vendée prit à la date du 4 mai 1911 un arrêté créant une Commission du Herd-Book Vendéen qui deviendra plus tard un simple "Syndicat Vendéen" du Herd-Book Parthenais.

A partir du tout début des années soixante-dix le Herd-Book Parthenais décide de faire de la race Parthenaise une race à viande spécialisée. Un noyau d’animaux plus laitiers se maintiendra cependant en Vendée autour de Longeville et St Benoist sur Mer, entre Luçon et les Sables d’Olonne. Cette race "Maraîchine", du groupe "Poitevin", ne doit pas être confondue avec une autre population dite également "Maraîchine", constituée au milieu du 19ème siècle à partir de croisements Durham et Normands et présente dans le Marais Breton et les Marais de Challans, entre le Pays de Retz en Loire Atlantique et St Gilles Croix de Vie en Vendée. Cette population "Maraîchine" du Marais Breton, maintenant disparue, aura fait longtemps tampon et frontière entre la Nantaise et la Maraîchine proprement dite qui est la seule nous intéresse ici.

Les années 80 : quand la Maraîchine renaît de ses cendres
En 1986 un trio d’amis : Jean Guillaud (agriculteur), René Rozoux (naturaliste) et Christian des Touches (expert lainier) se lancent dans une entreprise qu’ils qualifient de "folle" : reconstituer un cheptel de la race "Maraîchine". A peu prés dans le même temps, Laurent Avon, de l’Institut de l’Elevage, entreprend de faire un recensement des souches mixtes ou laitières de la Parthenaise, toujours connue dans le Marais sud sous le nom de Maraîchine, menacées par le changement d’orientation de la Parthenaise vers un type "à viande" très spécialisé. Les deux initiatives se rencontrent et décident de collaborer. En 1987 André Violet, de Longeville (85), est amené à vendre une partie de son troupeau constitué de très bonnes vaches Parthenaise-Maraîchines traites. Les deux meilleures vaches sont achetées par l’Ecomusée du Daviaud. Pour les autres, les trois amis cités, se cautionnant mutuellement, empruntent pour les acheter.

Les démarches qui suivirent furent laborieuses mais le Conseil Général de Vendée, sollicité par Jean Guillaud à travers le Parc Naturel Régional du Marais Poitevin accordèrent une première subvention permettant de rembourser les emprunts et de créer en février 1988 "l’Association pour la Valorisation de la Race Bovine Maraîchine et des Prairies Humides". Dans les années 1989, 90 et 91 et même plus tard encore une cinquantaine de vaches, en général très âgées, de type Maraîchin dominant, purent être achetées par l’Association.

Maraichine3La consolidation des effectifs dans les années 90: une croissance exponantielle
La progression des effectifs fut assez rapide car les vaches Maraîchines, bien que déjà vieilles, avaient une très bonne fécondité. Tous les produits femelles purent être replacés par l’Association dans des élevages sûrs, y compris dans des élevages non individuels comme le Lycée Agricole de Luçon-Pétré, le Puy du Fou,  les réserves naturelles de Charoin, de Choisy etc, et le domaine INRA de St Laurent de la Prée.

Si de vieilles vaches subsistaient encore il n’y avait plus, dans la nature, de taureaux leur correspondant. Heureusement de la semence de vieux taureaux Parthenais de type mixte nés dans les années soixante, avant l’orientation prise par la race vers un type à viande très spécialisé, fut retrouvée au Centre d’Insémination Animale de La Roche sur Yon (85). Ces taureaux accouplés aux meilleures vaches sauvées sont à l’origine de tous les taureaux suivants. A ce jour la semence de 28 taureaux a pu être collectée dans le cadre du programme de conservation de la race.

En 1999, un code race Maraîchin (58) est enfin créé. Il officialise l’existence indépendante de la race. Toutes ces actions ont pu être financées par le Conseil Général de Vendée, le Parc Interdépartemental du Marais Poitevin puis par le CRAPAL (Région Pays de La Loire) et le CREGENE (collectivités territoriales de Poitou Charente). La Maraîchine a dépassé en 2015 la barre des 2000 femelles : partie de 160 vaches en 1995, elle a donc plus que décuplé ses effectifs en l’espace de 20 ans, ce qui est exceptionnel pour une race à très faibles effectifs.

Les atouts de la Maraîchine : rusticité, croissance lente et mixité
La Maraîchine a été constituée à partir de souches femelles d’origine vendéenne sud, non culardes, et a été orientée, depuis, d’après des critères parfois légèrement décalés des anciens caractères de la vieille Maraîchine-Parthenaise dont elle descend (par exemple on préfère les robes gris-souris, les têtes longues, les cornes en lyre et les animaux avec du squelette et de grand gabarit). Elle diffère de sa cousine Nantaise par sa robe plus rouge, les muqueuses et le bord de l’oreille en général noirs, la forme de la tête, des cornes plus tourmentées, l’ampleur du squelette. C’est une bonne mangeuse d’herbe qui se complait sur les prairies humides des marais de Vendée et de Charente. Elle a gardé toute sa rusticité, sa fécondité, sa facilité de vêlage. Sa facilité d’usage convient donc parfaitement pour la gestion de grands troupeaux en système extensif.

Maraichine4Le fait qu’elle n’ait pas eu de programme de sélection spécialisé vers la production de viande fait que, comme pour toutes les races non sélectionnées, elle a gardé une croissance plutôt lente. Mais ce qui peut paraître être un inconvénient dans des systèmes de production où il faut produite beaucoup de viande en peu de temps devient un atout pour la Maraîchine : ses éleveurs ont vite compris que les systèmes d’élevages basés sur l’utilisation optimale des ressources en herbe et en fourrages grossiers permettaient à ces animaux peu précoces de prendre leur temps pour se développer, sans surcoûts pour les éleveurs, et que la qualité et le goût de la viande s’en trouvaient positivement impactés. En effet, il n’est plus à prouver aujourd’hui que les meilleures viandes proviennent d’animaux dont l’alimentation est presqu’exclusivement basée sur les fourrages plutôt que sur les céréales.

Aujourd’hui, la Maraîchine est principalement valorisée par la vente de viande de veaux sous la mère, le plus souvent vendus en vente directe sous forme de colis. Les éleveurs gardent une commercialisation plutôt individuelle mais quelques uns d’entre eux prospectent vers des marchés qui nécessiteront peut-être une structuration plus collective dans les années à venir : peut-être verrons-nous prochainement fleurir une marque mettant en avant le veau rosé Maraîchin et ses nombreuses qualités gustatives et environnementales ?

Parmi les autres modes de valorisation, citons également l’entretien des territoires (plusieurs éleveurs de la Venise Verte dans le Marais Poitevin ont fait le choix de la Maraîchine pour entretenir les prairies de marais, uniquement accessibles en bateau) ainsi qu’une tendance qui se confirmes ces dernières années, basée sur la valorisation du lait de Maraîchine. Il n’est pas toujours facile de remettre à la traite des vaches élevées depuis plusieurs générations dans des systèmes allaitants, mais quelques éleveurs de Maraîchine en font le pari et misent sur la qualité de son lait plutôt que sur la quantité, pour la transformation à la ferme en crème, fromage, yaourts et même crèmes glacées.


Texte et photos : Delphine Duclos & Lucie Markey


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