La Montbéliarde, avec son regard charmeur, est célèbre pour ses taches de couleur rouge dessinées sur sa robe blanche. On la reconnait également à sa tête et ses membres qui restent la plupart du temps blancs.
Sélectionnée depuis le 18è siècle sur un territoire montagneux, herbager, les Montbéliardes ont un comportement grégaire et actif, et sont faites pour valoriser l’herbe. 50% d’entre elles sont entretenues dans des systèmes herbagers. A cela s’ajoute la tradition fromagère de la région d’origine, la Franche-Comté, et l’exigence ancestrale des fromages pour la matière noble du lait et l’absence de mammites.
Histoire :
L’histoire commence au XVIIIe siècle en Franche-Comté. À l’époque, le bétail, de race « comtoise » se compose de deux types locaux : la Tourache et la Fémeline. Dans le massif du Jura, la Tourache, au pelage rouge, était exploitée pour le lait mais fournissait aussi des bœufs de trait appréciés pour le travail en forêt et le transport du bois. La Fémeline, plus présente dans les plaines et basses vallées, était de couleur froment. De stature plus fine, cette vache de caractère donnait aussi plus de lait. Vers 1708, les éleveurs de l’Oberland Bernois (mennonites, Suisse), persécutés dans le pays de Berne, trouve asile dans la région de Montbéliard en amenant avec eux leur cheptel. Ce dernier, issu d’une sélection déjà ancienne de la race de Berne, est plus homogène, plus lourd et plus productif que la moyenne. Ces qualités lui donnent une certaine renommée et se diffuseront peu à peu dans les troupeaux locaux, jusque sur les plateaux du Haut Doubs.
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Vache comtoise type "Taurache" | Vache comtoise type "Femeline" | Vache de Berne |
Après près d’un siècle de travail pour obtenir un cheptel performant et homogène, c'est en 1872 que la dénomination de "race Montbéliarde" est utilisée pour la première fois. Joseph Graber, descendant de mennonites et éleveur chevronné du pays de Montbéliard, qualifie ainsi les bovins qu’il présente au comice de Langres. Sous l’impulsion de J. Boulland, vétérinaire et vice-président du comice Montbéliard, et avec l’appui de Jules Viette, natif de Montbéliard et alors ministre de l’agriculture, la race Montbéliarde est officiellement reconnue en 1889 à l'Exposition universelle de Paris.
Aujourd’hui, la race Montbéliarde constitue 95% des effectifs laitiers de Franche-Comté. Issue d’une tradition fromagère, cette laitière à haut potentiel est aussi solidement implantée dans tout l'est, le sud-est et le centre de la France. Elle a même constitué des noyaux importants dans le sud-ouest et l'ouest. Elle est exportée dans le monde entier et, à ce titre, elle représente un des fleurons de l'élevage français.
La Montbéliarde, 2è race laitière de France
Au fil des années, grâce à ses qualités, la Montbéliarde parvient à convaincre nombre d’éleveurs et s’implante sur tout le territoire national. Aujourd’hui, elle représente la deuxième race laitière, derrière la Prim’Holstein mais devant la Normande, avec près de 428 000 femelles au contrôle laitier (= 18% de cheptel national).
Ses performances : 7 172 kg de lait à 33.1 g/kg de taux protéique et 39 g/kg de taux butyreux (matière grasse). Ce lait est adapté à la transformation fromagère. En effet, il dispose d’un excellent rapport de taux (TB/TP : 1.18), de 37% de variant B Kappa-caséine qui optimise la coagulation des protéines et surtout, 97% des AOP fromagères (qui imposent une notion de race dans leur cahier des charges) plébiscitent la Montbéliarde. Ces trois points font de la race la N°1 des AOP fromagères françaises.
Avoir des vaches qui produisent, c’est bien. Mais avoir des vaches qui produisent longtemps, c’est mieux ! Les montbéliardes sont 2 fois plus nombreuses à atteindre la 5ème lactation : 18% d’entre elles contre 10% pour les normandes et 8% pour les holsteins (IDELE, France Conseil Elevage, 2019). Cette longévité a une conséquence directe sur la rentabilité des exploitations. Assurément avec une forte proportion de vaches capable de rester longtemps dans les élevages, le besoin en renouvellement est moins conséquent ; les charges sont réduites.
La Montbéliarde est principalement appréciée pour sa robustesse. Le principal avantage cité par les éleveurs est « moins de problèmes de santé » (enquête Grand-Ouest, 2012). La Montbéliarde est très peu sujette aux mammites, aux maladies métaboliques (fièvre vitulaire, déplacement de caillettes) et aux difficultés de vêlage. Et en cas de difficulté passagère, ses réserves corporelles et son tempérament de battante l’aident à passer le cap. Au final, et par rapport aux troupeaux holsteins ou normands, les frais vétérinaires à l’UGB sont diminués de 34% (CER France, 2018).
La race Montbéliarde produit du lait de meilleure qualité sanitaire. Sa résistance naturelle aux infections mammaires permet d’éviter les traitements antibiotiques et garantit un meilleur paiement du lait aux éleveurs.
Une championne de la reproduction, malgré une forte production, la Montbéliarde ne pallie pas à sa reproduction. 25 jours gagnés entre 2 vêlages : les troupeaux montbéliards affichent un intervalle vêlage-vêlage moyen de 402 jours contre 427 jours pour les troupeaux holsteins (INRA, Eco’Montbéliarde, 2018). Cette différence s’explique par une meilleure efficacité à féconder : 24 doses de moins pour 60 Montbéliardes.
La Montbéliarde, une laitière polyvalente
Grâce à ses origines, la Montbéliarde est une vache laitière équilibrée et robuste. Elle peut être utilisée dans tous les systèmes d’élevage français.
En montagne, la qualité du lait de la Montbéliarde en fait une fromagère reconnue. En altitude, sa solidité et son tempérament lui permettent d’arpenter toutes les collines et de résister aux fortes variations de température.
Cette franc-comtoise d’origine se prête merveilleusement bien au pâturage. En effet sélectionnées depuis le XVIIIe siècle sur un territoire herbagé, les montbéliardes ont un comportement grégaire et actif au pâturage et sont faites pour valoriser l’herbe. Aujourd’hui 50% d’entre elles sont entretenues dans des systèmes basés sur l’herbe (pâturage et foin).
Les cinquante autres pourcents des montbéliardes sont entretenues dans des systèmes de plaine, avec une ration basée sur l’ensilage de maïs. Les systèmes intensifs extériorisent pleinement le potentiel laitier de la Montbéliarde, capable de produire plus de 10 000 kg de lait par lactation. Cette productivité ne se réalise pas au détriment de la longévité. Les montbéliardes sont peu sujettes aux maladies métaboliques (fièvre vitulaire, retournement de caillette,…), et leurs réserves corporelles leur évitent de nombreux problèmes de santé (fertilité). Les vaches Montbéliardes possèdent aussi un mental d’acier leur permettant de s’imposer dans les grands troupeaux.
La Montbéliarde « bat l’acier » mais aussi le fer, avec sa santé adaptée au « bio ». Sa faculté à valoriser les fourrages grossiers, le peu d’intervention vétérinaire et d’emploi d’antibiotiques qu’elle suscite permettent de remplir les conditions du cahier des charges de l’agriculture biologique.
Pour la production de veaux croisés, la Montbéliarde s’avère être un véritable moule à veau. Grâce à sa mixité et à sa facilité de vêlage évidente, la Montbéliarde est un excellent support pour le croisement avec des taureaux de race à viande (Charolais, Limousin, Blanc Bleu Belge). En 2018, 34% des femelles montbéliardes ont été inséminées avec un taureau de croisement pour produire des veaux très bien conformés et aux qualités gustatives reconnues.
Des animaux historiquement adaptés au pâturage et à la production fromagère
L’histoire et les caractéristiques actuelles de la Montbéliarde n’auraient pas été les mêmes sans les spécificités de son territoire d’origine. Au fil du temps, dans un massif jurassien au climat continental, les éleveurs ont conservé les animaux les plus rustiques, résistants aux hivers longs et rugueux. La grande place laissée à la prairie et le peu de céréales disponibles ont conduit les éleveurs à sélectionner des vaches tirant le meilleur profit de l’herbe. Les vaches au caractère grégaire facilitaient également la garde des troupeaux dans les grands pâturages communaux.
La tradition fromagère de la Franche-Comté n’est pas non plus étrangère aux caractéristiques actuelles de la Montbéliarde. Dès le XIIIe siècle, dans les hauts-plateaux, la collecte et la transformation du lait ont été organisées dans le cadre des fruitières fromagères. La nécessité d’approvisionnement de ces structures coopératives qui se sont développées après 1900 jusque dans les zones de plaine, explique la forte orientation laitière de la race. Par ailleurs, l’exigence ancestrale des fromagers pour la matière noble du lait et leur proximité avec les producteurs sociétaires entraîneront une forte pression pour améliorer la qualité du lait. Depuis 1958 et la reconnaissance de l’AOC Comté, la Montbéliarde est la seule race (avec la Simmental) habilitée à produire ce grand fromage français.
Un potentiel laitier et une rusticité qui lui ouvrent les portes du monde
Dès le début des années 1900, l'image de marque de la Montbéliarde va rapidement s'imposer. Elle est en expension rapide dans tout l’Est de la France, et particulièrement dans les régions montagneuses et fromagères, et où elle supplante les races indigènes grâce à son potentiel. Les laitiers du Midi de la France en sont également friands : en 1910, 4 000 vaches laitières y partent de la gare de Morteau. Avant la première guerre mondiale, ce marché s'étend à l'Algérie, où les montbéliardes prouvent leur adaptabilité climatique et sont appréciées pour leurs aptitudes mixtes. Dans les années 20, c’est au Maroc et au Cameroun que des croisements avec des taureaux montbéliards sont réalisés.
Vers 1955, un courant commercial important se met en place avec le Massif-Central. Les Montbéliardes conviennent bien aux systèmes de production en place. La tradition est de leur faire produire des veaux croisés charolais, très bien valorisés sur les marchés auvergnats.
Dans les années 1970, les éleveurs de l’Ouest et du Sud-Ouest viennent à leur tour chercher la Montbéliarde pour remplacer la Maine-Anjou, ou remplacer leur troupeau laitier touché par des problèmes sanitaires. Une nouvelle vague d’importation a lieu dans les années 2000.
Du côté international, des groupements de producteurs développées à partir des années 1970, ont permis à la race d’être exportée dans une cinquantaine de pays et sur tous les continents. En 2018, ce n’est pas moins de 902 000 doses montbéliardes qui ont été vendues et 14 786 femelles exportées vers plus de 40 destinations, illustrant ainsi toute la capacité d’adaptation de la race.
Dynamique, robuste et efficace ! La Montbéliarde s’apprête à relever les défis d’un élevage respectueux, des enjeux environnementaux et sociétaux du 21è siècle.
Pour en savoir plus : www.montbeliarde.org