On trouvait autrefois, aux creux des vallées et en haut des sommets du Massif-Central, une chèvre rustique, à poils longs, qui accompagnait la vie de chacun dans les fermes familiales.
Cette chèvre de taille moyenne à la silhouette trapue et aux différentes robes se trouvait principalement en Auvergne, mais se rencontrait également de la Nièvre à la Lozère et de la Haute-Vienne à la Drôme. Au début du XXè siècle cette chèvre locale occupait un vaste territoire de 25 départements. Il faut dire que son ossature forte et sa large poitrine la prédestinait à être une bonne marcheuse sur terrains pentus et à supporter les intempéries. Se nourrissant de peu (fourrages grossiers et pâtures pauvres), elle était surtout utilisée pour produire un lait riche, principalement transformé en fromage. Docile et proche de l’homme, cette chèvre très maternelle avait aussi une bonne longévité.
Les effectifs de ces chèvres ont commencé à décliner dans les années 60, du fait de l'exode rural. En même temps, des « néo-ruraux » d’origine citadine se sont installés dans les campagnes et implantèrent des élevages plus spécialisés, utilisant deux races de chèvres d’origine Suisse, l’Alpine Chamoisée et la Saanen. De plus, la politique agricole orientée vers une production intensive, va rapidement remplacer les races locales par ces races dites « modernes », qui produisent plus de lait.
En 1993/94, l'association FERME s'est inquiétée de la diminution de la population de cette chèvre et a procédé à des prospections afin d'établir un état des lieux. À l'époque seulement 200 animaux ont été retrouvés.
En 1996 , l’Association pour le Renouveau de la Chèvre du Massif-Central (l'ARCM-C) est constituée afin de mener une action commune de préservation de cette race locale et de retrouver les derniers spécimens du pays.
Une grande diversité est ainsi constatée. Cela tient surtout qu'au siècle dernier, les routes étaient peu nombreuses, les échanges n'étaient pas facilités. Chaque secteur (vallée, plateau, creux, etc) a ainsi développé ses propres caractéristiques, résultant en une grande variété d’une localité à une autre.
Cependant, des traits de phénotypes communs pour tout le Massif-Central et ses contreforts ont permis de rassembler ces animaux sous la dénomination « Chèvre du Massif-Central ». Petit à petit, les animaux sont recensés, comptabilisés. Un registre est mis en place. Depuis les années 2000, l’Institut de l’Élevage tient également un inventaire précis des animaux et, en 2010, le ministère de l'Agriculture reconnaît officiellement la race Massif-Central.
Aujourd'hui, soit 24 ans après la création de l'ARCM-C, l'effectif s'élève à 1.245 animaux. La chèvre du Massif-Central reste donc une race locale à faible effectif. A titre de comparaison avec la race de chèvres la plus répandue en France, soit l'alpine chamoisée : en 2017 l'Institut de l’Élevage recensait plus de 486.000 chèvres de race alpine, chez 1.300 éleveurs. La même année, la chèvre du Massif-Central comptait 1.196 chèvres pour 65 éleveurs.
Le chemin est donc long pour remonter l'effectif des chèvres du Massif-Central, car beaucoup d’animaux présentaient des signes évidents de croisements, et absorber le sang étranger d'une race prend du temps.
La chèvre du Massif-Central est aujourd'hui toujours appréciée pour ses qualités laitières, sa rusticité, quasiment sans problème sanitaire, et sa très bonne aptitude à l'utilisation des ressources naturelles et renouvelables (herbes, feuilles, jeunes arbres, ligneux, ronces ...). En hiver, elle mange le foin produit majoritairement à la ferme et peu de concentrés.
La plupart des éleveurs de chèvres du Massif-Central sont essentiellement fromagers, avec des troupeaux allant jusqu'à 80 animaux. Pour ces éleveurs, la production est très honorable avec une bonne valorisation fromagère. La transformation se fait à la ferme, les élevages sont majoritairement en agriculture biologique. Le lait est transformé en fromages, yaourts, glaces, confitures de lait, savonnettes et produits de beauté. Un contrôle laitier et de recherche de taux (butyreux et protéique) a également été mis en place par quelques éleveurs afin de définir des objectifs et des critères de sélection sur leur élevage.
Parmi les éleveurs, beaucoup choisissent l'écopâturage, avec des troupeaux allant de 60 à 100 animaux. La robustesse de la chèvre du Massif-Central, sa faculté d'adaptation aux intempéries (en particulier au froid) et son aptitude au parcours en font un animal tout à fait destiné au débroussaillage.
Quelques éleveurs se sont orientés exclusivement vers la vente de reproducteurs, mais ils restent assez peu nombreux, avec des troupeaux d'une vingtaine d'animaux. De nombreux éleveurs réservent également quelques animaux pour la vente de reproducteurs, ce qui permet un bon brassage génétique.
Enfin, les particuliers qui sont tombés amoureux de la chèvre du Massif-Central ont 2 ou 3 animaux, dont ils auto-consomment le lait et/ou le transforment en fromages frais.
La Chèvre du Massif-Central revient petit à petit dans le paysage. Sa facilité de contact avec l'homme en fait une chèvre vraiment attachante.
Caractéristiques de la chèvre du Massif-Central
* Chèvre de taille moyenne : femelle : 45-60 kg / hauteur au garrot : 60-65 cm ; bouc : 60-70 kg / hauteur au garrot : 69 à 80 cm.
* Animaux à croissance lente : fin de croissance vers 3/4 ans,
* Ossature forte, large poitrine, silhouette trapue, qui tient dans un carré : Poils longs sur le dos et les cuisses (manteau & jupe) éventuellement sous le ventre,
* Tête large, chanfrein droit ou légèrement convexe,
* Oreilles à l’horizontale, orientées vers l’avant, en cornet et assez longues (arrivant à la commissure des lèvres),
* Tête motte ou cornue (cornes moyennes en longueur mais larges et resserrées à la base, orientées vers l’arrière),
* Production annuelle : 300 l. (à mettre en relation avec le mode d’élevage).
* Sang étranger : chèvre et bouc doivent avoir moins de 25 % de sang étranger pour pouvoir prétendre au titre de chèvre du Massif-Central (et au maximum 12,5 % de sang étranger pour entrer au livre principal).
Les boucs doivent être confirmés afin de pouvoir devenir reproducteurs MC.
Coordonnées :
L’ARCM-C (Association pour le Renouveau de la Chèvre du Massif-Central)
Route du Charron
43550 SAINT-FRONT
Tél : 04 71 59 56 77
Fax : 04 71 59 52 77
E-mail :
Site internet : www.arcm-c.com
Facebook :https://www.facebook.com/AssoChevreMC/
L’auteure : Lise Luttringer
Éleveuse de chèvres du Massif-Central depuis 2017 à 900 m d'altitude dans le Puy-de-Dôme. Troupeau en élevage extensif, 14 animaux au début 2020.En attendant d'agrandir le troupeau et de vendre quelques fromages à la ferme, le lait actuellement produit est auto-consommé : lait de chèvre, yaourts et fromages au lait cru (lactiques et petites tommes). Consommation familiale des cabris mâles.
L'Association
L'Association pour le Renouveau de la Chèvre du Massif-Central (ARCM-C) fondée en 1996 est constituée de passionnés bénévoles. Son rôle initial a été d'augmenter les effectifs, de limiter la consanguinité, d'éliminer progressivement le sang étranger et d'améliorer le phénotype.
L'association a mis en place le standard de la race et un système d'agrément des boucs reproducteurs (la confirmation). Elle aide à la constitution de troupeaux en facilitant la mise en relation avec les éleveurs.
A ce jour, elle compte une 60aine d'adhérents, de plus en plus de jeunes et/ou en reconversion professionnelle vers une agriculture paysanne, durable et respectueuse de l’environnement.
L'Association assure la promotion de la chèvre du Massif-Central à travers un site internet, une page Facebook, une plaquette, des affiches, la participation à des manifestations et organise une fête annuelle. Le point fort de la promotion de la chèvre du Massif-Central a en effet lieu à l'occasion de la Fête de la chèvre, organisée tous les ans, le 3ème dimanche de juillet à Saint-Front (Haute-Loire).